quelques histoires échangées

Ça meurt jeune aux États-Unis et ça vit vieux dans la région de Charleroi!
En voilà un sous-titre aussi tapageur !

Steve Albini, j’en avais jamais entendu parler avant 2016, avant la sortie du premier album des Liégeois de Cocaine Piss. Faut dire que je les ai suivit dès le premier titre et premier clip, iels avaient frappé fort. Je l’ai passé un nombre incalculable de fois à la radio, leur “Pigeon” d’une minute et seize secondes, dont je ne connais toujours pas les paroles, mais que je peux continuer à écouter en boucle ! Tout comme encore regarder le clip. Faudra que je leur demande un jour, qui a fait ce clip, parce que c’est clairement le plus génial de tout ce qu’iels ont fait. Après, ça a été une autre histoire, y’a eu un label, un premier album enregistré/mixé par Steve Albini, des tournées, …. Mais ce titre c’est juste leur démo de 2015. J’avais même envoyé des mails à leur label pour leur proposer d’en avoir dans ma distro, sans réponse. C’est dire si j’étais motivé ! Et lors de la fiesta du skatepark des Ursulines, iels étaient déjà bookés pour l’année. Je ne m’étais pas bien rendu compte que ça marchait déjà fort pour elleux. Leur concert de 17 minutes m’avait quand même fait plaisir à Dour (2018 ?), en se barrant à travers la foule et en abandonnant le micro quand le fil était finalement trop court (10m au moins) pour, j’imagine, aller au bar. Juste ce qu’il faut. Quoi qu’il en soit, leur premier disque avait été fait par Albini, et ça avait eu l’air de calmer tout le monde.

Mais là n’est pas le sujet, parce que le sujet, c’est le GAM, le Groupe d’Action Musicale. Dont on m’a seulement raconté leur bio le temps d’un verre au Capitaine : iels jouent en manif et en concert de soutien depuis plus de 40 ans, musique engagée, chanson à texte, groupe mixte aux contours flous et aux instruments variants. On m’explique qu’iels ont soutenu énormément de luttes, surtout contre une central nucléaire, ont chanté lors de piquets de grève, et comble de tout ça, pour un concert de soutien à Bruxelles aux blessés de Sainte-Soline, se sont déplacés au Labokube, et sont partis sans demander leur défraiement. Iels étaient parti·e·s discrètement rentrer dans la région de Charleroi, mais lorsqu’on leur téléphona pour leur dire qu’il y avait un défraiement, ils n’en voulurent pas. Pour la lutte encore et toujours! Je vous raconte tout ça de mémoire. Et justement, je voulais absolument en savoir plus depuis. On m’avait dit que leur site/blog était bien fourni, et c’est exacte! Mais par curiosité, j’ai cherché sur les réseaux sociaux ce qu’on disait d’eux. Et en gros, rien ne sort. Sauf ça :

essayez ce lien pour voir ce qui sort chez vous :
https://www.facebook.com/search/top/?q=groupe%20action%20musicale

Èlg – 9 mai 2024

A l’époque où j’habitais à Lausanne en 2001, les copains d’Honey for Petzi venaient juste d’enregistrer avec Steve Albini à Chicago. Je me souviens d’avoir posé 54 questions à Sami, un des membres du groupe, pour savoir comment ça se déroulait dans son studio, là-bas. Il m’avait dit que Mr Albini et sa compagne aimaient bien le soir se faire des plateaux repas devant la télé. Ce détail inconséquent m’avait fait comprendre que le type était resté simple.

Comme de nombreuses autres personnes, j’ai un grand respect pour l’approche sonore d’Albini. Ca semble un peu débile, dit comme ça mais il écoutait avec les oreilles. C’était une des raisons principales du choix de l’enregistrement par la bande magnétique (entre autres mille raisons comme tous les effets de distorsions et de colorations possibles), l’oeil ne dirigeait pas son écoute. Une autre raison, qu’il expliquait dans une masterclass récemment, c’est que les rendus et possibilités d’enregistrements digitaux valaient tout à fait la bande magnétique maintenant mais le détail technique absolu pour lui c’est qu’un enregistrement sur bande de 1986, tu ouvre la boîte, tu la charge dans le magnéto et tu as tes 16 pistes comme tu les entendais 35 ans auparavant. Contrairement à l’approche software ou rien ne peut s’ouvrir après deux ans car les plusgins et autres outils ne sont pas updatés.

Il choisissait son matos pour ce qu’il sonne et pas ce qu’il coute. Dans son studio il avait une rangée de compresseurs RNLA de chez FMR, ça coute rien et pour lui ça faisait grave le boulot sur des basses ou des éléments de batterie. D’ailleurs j’en avait acheté un après l’avoir entendu dans un docu sur lui : )

En plus de sa musique (“at Action Park”, je l’ai bien poncé cet album) et de sa patte de production éternellement reconnaissable , ce sont tous ces petits conseils et réflexions de tonton Albini qui m’ont guidés depuis toujours dans mon travail d’enregistrement et de mixage.

J’aimais bien savoir qu’il était sur cette planète, à faire un peu chier le monde. Et une fois de plus ça me fait me dire que toutes les ordures sur cette terre vont comme d’habitude mourir centenaires.

source ici

Ce hasard faisant donc son chemin, je me fais la réflexion que ce genre d’infos, si on ne les avait pas achetées dans des journaux spécialisés, nous arrivaient oralement par quelqu’un·e. Ou bien elles ne nous arrivaient pas, et c’est ainsi. À l’inverse, on avait dit (ou avait-il supposé) au réalisateur bruxellois Jean-Marie Buchet, que son ami de jeunesse, Julien Parent (avec qui il faisait des fanzines milieu des années 60) s’était suicidé au début des années 90. Et c’est en 2023, en cherchant des infos sur celui-ci, que l’éditrice des éditions de l’Agneau m’apprend que Julien est toujours vivant et même mieux, qu’il est dans le home à côté du Jeu de Balle. La semaine suivante, on a bu bières-et-vin rouge ensemble dans sa petite chambre et recomposé avec éclat le passé! C’est que ces messieurs ont plutôt de 80 ans quand même!

Mais d’ailleurs, maintenant que j’y repense, ma recherche sur le GAM sur les réseaux est aussi parti du papier, et plus exactement du livre que je venais de recevoir : “Quand la police nous fait chanter”, qui vient d’être réédité et mis à jour. Une compilation de tous les textes de chansons contre la police, agrémentée de citations diverses et vivifiantes d’un peu partout, et d’une très très riche iconographie. Le tout sans demander aucun accord à personne, ni aux auteurs, ni aux musiciens, ni aux illustrateurs. C’était déjà le cas de la première version de 2015. Et c’est en le feuilletant que je tombe, page 75, sur le texte de “Allez les gars” et me rends compte que je connais vaguement les paroles parce que les René Binamé l’ont reprise. Donc, je veux aller à la source, d’où cette quête d’information!

Mais j’ai préféré vous partager “Quartier Nord”, parce que ça crée encore des liens. J’ai entendu pour la première fois ce texte lors de la chorale de fin du festival “Pour le droit à la ville” qui avait lieu au DK fin mai 2024. Elles nous ont même distribué les textes pour chanter avec elles! Quelle super bonne idée de terminer un dimanche soir (après deux jours de discussions/conférences) par un chant, guidé par cette grande chorale militante et féministe : Les Strikes !

Enfin donc, voilà, tout se recoupe. Il n’y a pas de hasard, enfin pas vraiment, enfin bon, y’a un algorithmes dans le lot quand même.

Pour terminer cette parenthèse involontaire, que dit-on de tout ce monde sur Wikipédia ? Eh bien, l’on a une page un peu sommaire en français et bien sourcée pour le groupe GAM. Alors que pour Cocaine Piss, il n’y a qu’une seule page en flamand ! Ça raconte des choses… un groupe liégeois, à portée internationale ? Je me demande de quoi parlent vraiment les textes de Cocaine Piss. Je parierais plutôt sur l’énergie, le fun de mots anglais et la performance plutôt que sur des textes engagés. “Cosmic Bullshit”. Ont-iels joué pour des luttes ? En tout cas, Cocaine Piss c’est déjà terminé alors que le groupe GAM existe toujours. Les deux ont fait des morceaux qui sont des réactions à des moments de leurs vies; de leurs luttes pour le GAM. On pourrait penser que les chansons sur la lutte contre une deuxième centrale nucléaire à Chooz sont passées, mais rien que la lecture de la page Wikipédia de cette centrale nous raconte de belles histoires franco-belge, où la lutte n’est résumé en une ligne. Ça raconte de choses aussi… Mais quand même, dans le doute, ils ont tout éteint en 2021, en attendant la suite, si j’ai bien compris.

Alors, qu’est-ce qu’on écoutera encore dans 30 ans ? le ronronnement des neutron dans Chooz? les disques de Cocaine Piss ? ceux du GAM ? Et pourquoi pas les deux sur fond de paysage nucléaire!

Niko